Pensée Sociologique, Chapitre IV, V et VI.

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IV- La diversité sociologique:

La sociologie n'est pas homogène, n'est pas enfermée dans un discours indiscutable. D'autres ont construit et pensé la sociologie de manière différente que l'avait fait Durkheim.

D'abord toutes les disciplines scientifiques ont des divergences d'analyses, de regards, de postures concernant son exercice. Par la suite, on peut dire que c'est une bonne chose qu'il y ait une diversité sociologique: cela permet le regard critique. Une discipline qui interdit ou rend impossible le regard critique, est une discipline fasciste. Il y a une liberté critique que la discipline doit accorder. Bachelard exprime l'idée que ce qui doit primer dans le raisonnement scientifique c'est la raison critique plutôt que la raison architectonique: le savoir, la connaissance scientifique ne se fait pas en accumulant les savoirs comme c'est le cas de la raison architectonique; mais par la raison critique c'est-à-dire par le droit de critiquer et de réinterroger des savoirs qui paraissent acquis. D'ailleurs une discipline vie par le droit de regard et de critique, et c'est parce que la discipline autorise la raison critique qu'elle est diverse. C'est la raison critique qui a permis d'acquérir d'autres connaissances, dans d'autres domaines. De plus, la raison critique ce n'est pas un point de vue idéologique, ce sont des démonstrations scientifiques qu'on oppose à ce qui est acquis déjà dans la discipline.

 

Les trois autres manières de faire la sociologie:

- le subjectivisme ou la sociologie dite compréhensive

- l'École de Chicago

- la sociologie dite constructiviste

 

A- Le subjectivisme ou la sociologie dite compréhensive: Max Weber (1864- 1920)

Max Weber a vécu à la même époque que Durkheim. Max Weber est allemand, il est né dans une famille calviniste et très cultivée et religieuse. C'est une famille plutôt inscrite dans le champ politique, son père a été député, et qui a des revenus tout à fait confortables. C'est un élève brillant, qui va très vite à l'université où il étudie le droit, l'économie, la philosophie, l'histoire. Il obtiendra un doctorat en 1889, qui est un doctorat plutôt d'histoire car ca traite de l'histoire des sociétés commerciales au moyen-âge. Deux ans plus tard, il fait une affiliation pour devenir professeur, et devient professeur d'université en 1894 à Fribourg. C'est un peu plus tard, alors qu'il est plutôt historien qu'il commence à s'intéresser à la sociologie et publie en 1903 Le savant et le politique, qui est un ouvrage un peu a dimension épistémologique. Deux an plus tard, en 1905 il publiera son ouvrage de référence: L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme. Dans son livre, il se révèle comme étant un sociologue de la religion, de l'économie et de la politique. Sur le reste de sa vie, il sera un peu comme Durkheim, préoccupé sur l'institutionnalisation en Allemagne de la sociologie et créera la société allemande de sociologie à travers lequel il essaye de légitimer la sociologie. Il est marqué par les idées pacifistes, et s'opposera à la guerre 14-18 et au lendemain de cette guerre, il créera un parti politique: le parti démocratique allemand. Il participera à la rédaction de la nouvelle constitution allemande.

Les points importants des études de Max Weber:

- une critique de la façon de faire l'histoire; c'est un historien critique: il va beaucoup critiquer la façon ancienne de faire l'histoire, qui est plutôt une histoire événementielle. Selon lui, l'histoire doit prendre en compte l'histoire des idées et pas seulement des hommes et des femmes; il est important pour lui de faire éclater la logique de la chronologie.

-l'idée du relativisme culturel: il oppose dans ses articles les sciences de la nature et les sciences de la culture. Les sciences de la nature désignent les sciences dures: la physique, la chimie, la biologie qui ont tendance à rechercher des lois universelles qui s'appliquent en tout temps et tout lieu. En opposition, les sciences de la culture cherchent plutôt des lois relatives car historiquement ces lois se modifient et notamment par le fait qu'elles sont le produit de la société, de l'humain et ainsi sont transformables. C'est ce qui va faire qu'il va beaucoup s'intéresser aux systèmes de valeurs et d'idées qui existent dans une société et qui sont intériorisés par les gens, sont collectives et ainsi qui contribuent à faire les comportements sociaux. Durkheim souligne le poids des valeurs collectives alors que Weber souligne l'influence seulement de ces valeurs collectives. Cette idée du poids du culturel sera démontré dans l'éthique du protestante et l'esprit capitalisme. Ce livre explique ce qui fait que le capitalisme est pu se développer lentement dans certains pays et rapidement dans d'autres pays. Il y a une différence que Max Weber essaye d'expliquer et qu'il relie aux systèmes de valeurs et d'idées qui existent dans une société; il insiste sur le rôle de la religion qui façonne ces modèles de valeurs et idéologiques. Les pays anglo-saxons sont plutôt protestants alors que les pays dits latins restent des pays sous l'influence de Rome et donc sous l'influence de l'église catholique de Rome. Il y a une corrélation voir une causalité entre les forme d'adhésion des nations et le développement du capitalisme. Le rapport à l'argent n'est pas le même dans ces pays car le rapport à la religion n'est pas le même. Dans la religion catholique, le croyant n'a pas d'accès directs à dieu ou que par intermédiaires alors que le croyant protestant peut avoir une relation avec dieu sans passer par des intermédiaires hiérarchiques. De plus un achat est considéré bon pour dieu, est considéré comme quelque chose étant pour dieu, dans le protestantisme et ce dernier favorise alors ainsi le rapport à l'argent. Tandis que l'église de Rome a toujours refusé l'usure ( le prêt) considérant que c'était mal honnête de faire de l'argent avec l'argent, et non conforme à la volonté de dieu. Les protestants ne vont pas avoir d'obstacles au développement du capitalisme là où il y en a pour la culture catholique qui va interdire le rapport à l'argent. Ce constat sera attesté par d'autres sociologues. Le poids de la religion se ressent également dans le rapport scolaire: les terres protestantes ont un rapport scolaire plus précoce.

Cette forte influence de la religion en ce qui concerne les pratiques, peut le restreindre un peu à un sociologue de culture.

- formes de rationalisation des actions sociales: Max Weber n'a jamais prétendu que les individus étaient libres, car les valeurs et idées culturelles sont trop influentes. De plus, Max Weber accepte moins le terme de détermination sociale, il pense plutôt à une influence et ce qui laisse penser que l'individu à des formes de rationalisation de ses actions sociales selon lui: il y a un système de valeurs, de penser, donc l'individu n'est pas libre mais en dehors de cela il y a des formes de rationalisation des actions sociales. Il s'agit de subjectivisme. Dans l'analyse durkheimienne l'individu est un objet, dans la sociologie Webérienne l'individu est un sujet. La sociologie d'influence wébérienne parlera des acteurs sociaux pour désigner ces formes de rationalisation des actions sociales. Cela le conduit à développer l'idée d'interaction.

- notion d'interaction: Max Weber ne considère pas l'individu comme libre car il est inscrit dans des cadres socio-temporels mais également parce que l'action des acteurs est en relation avec les autres, et l'action des autres; et ce sont ces systèmes d'actions qui font la société. Les individus par leur action interagissent entre eux, et donc l'action est déterminée par les actions des autres individus. C'est ces systèmes d'interaction qui font société.

- notion d'idéal type: c'est une accumulation sur un profil unique de la totalité des caractéristiques dominantes d'un groupe ou d'un phénomène étudié. Un idéal type n'est jamais la réalité, c'est un outil méthodologique construit mais jamais la réalité puisqu'on cumule sur un profil type toutes les caractéristiques dominantes du groupe ou du phénomènes étudiés; on grossi les caractéristiques du groupe étudié. C'est une construction sociale, et donc un outil de méthode.

Sa vertu, son usage c'est pour comparer. Ça permet de mesurer l'écart entre l'idéal type et les différentes réalités qu'on peut observer: en comparant l'idéal type à des réalités ou à d'autres idéaux types. Exemple d'idéal type: Max Weber construit l'idéal type du capitalisme dans L'éthique de la protestante et l'esprit du capitalisme; l'idéal type de l'étudiant apparaît dans Les Héritiers ou La reproduction de Bourdieu.

- la notion de légitimité: qu'est ce qui fait qu'un individu accepte une domination, de recevoir des ordres, d'être contraint dans ses interactions avec les autres ? Max Weber avance le concept de légitimité pour répondre à la question, qui est le mécanisme par lequel un individu accepte une contrainte ou une domination. Il distingue trois types de légitimité:

    • la légitimité traditionnelle: explique des comportements d'acceptation de contrainte, la tradition signifiant l'idée immuabilité: ca remonte depuis longtemps, quelque chose l'établit qu'on ne peut changer. Parce qu'une contrainte ou domination s'est toujours exercée comme cela, on ne la contredit pas et on l'accepte. Le pouvoir politique domine le citoyen. Le religieux fonctionne également sur une logique traditionnelle.

    • la légitimité charismatique: c'est une légitimité qui est une forme d'abandon de soi, de croyance au fait qu'une autre personne est plus capable que soi-même. C'est quand on renonce à notre propre pouvoir pour le remettre dans les mains de quelqu'un d'autre parce qu'on pense qu'il a une meilleure façon de faire, des caractéristiques particulières, et ainsi qu'on accepte de lui obéir. Elle peut correspondre à des moments où des français s'abandonnent à un personnage politique, le concevant comme un sauveur ou un héros: accession au pouvoir de Charles de Gaulle par exemple. De Gaulle va transformer une légitimité charismatique en légitimité légale-rationnelle en créant la Veme République.

    • la légitimité légale-rationnelle: c'est une légitimité qui s'appuie sur le droit ou des textes réglementaires; textes écrits qui imposent cette contrainte ou cette domination. C'est au nom de textes de lois qu'un gendarme ou un policier peut nous contraindre à présenter nos papiers d'identité, par exemple. Le régime politique est constitutionnel par exemple, repose sur la constitution.

 

A lire: L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme de Max Weber.

 

Les continuateurs de Weber:

 

- George Simmel (1858-1919)

-Ferdinand Tönnies ( 1855-1936): il a développé des réflexions intéressantes sur ce ce qu'est une société ( formes d'organisations collectives des êtres humains et leur nature). Il a tenu a distinguer la notion de communauté et la notion de société.

- communauté: c'est un ensemble de relations sociales et de formes d'organisations sociales caractérisé par la prégnance d'un lien social et étroit unissant ses différents membres. Elle est très souvent fondée, cimentée par de l'affectif, de l'habitude ou de la tradition ( =côté enfermant). Exemples: la famille, communautés villageoises, les communautés d'esprit ( gens réunis sur des systèmes idéologiques: communautés religieuses, sectes,....).

- société: formes d'organisations sociales et de relations sociales plus individuelles, interpersonnelles, et artificielles. Elle est fondée sur l'intérêt, l'obligation, le contrat ou le droit. Elle se construit sur une logique légale-rationnelle. ( les liens génèrent moins d'affect que la communauté et est donc moins enfermante, même si elle est contraignante). Exemples: entreprise ( contrat de travail), associations, la nation ou l'état....

 

Ce n'est pas une opposition définitive. Exemple de la nation: c'est une société mais il peut arriver qu'à certains moment elle bascule dans des mouvements historiques (révolution,....) qui représentent des mouvements communautaires; ce qui donnerait plus une position de communauté à la nation.

 

Weber a souvent étant pensé comme un politicien ou comme un historien, mais a mis du temps a être reconnu comme sociologue; c'est à partir des années 60 que ses travaux sont reconnus. Il s'est un peu opposé à Durkheim, et l'on peut résumer cette opposition à celle entre l'acteur ( a des actions sociales) et l'agent ( celui qui agis et qui est agis → déterminisme de Durkheim).

 

Boudon, Alain Touraine sont également des contemporains de Weber.

 

Bibliographie:

Alain Touraine, Le retour de l'acteur, 1974

Michel Crozier, L'acteur et le système, 1977

Raymon Boudon, La logique du social, introduction à l'analyse sociologique, 1983.

 

B- L'Ecole de Chicago:

C'est un courant sociologique qui s'est développé aux états-unis, à l'université de Chicago où dès la fin du 19eme (1882) s'est développé un département d'anthropologie et de sociologie. C'est une université qui sera à l'origine de la création d'une revue sociologique, american journal of sociologie; l'on est donc bien dans une logique d'institutionnalisation de la sociologie par l'université de Chicago. L'école de Chicago est influencée par la sociologie weberienne ( forme de rationalités de l'acteur). Les sociologues de Chicago ont rencontré les sociologues allemands, ce qui fait un lien intellectuel entre eux. Cette école se développe très fortement dans la deuxième moitié du 20eme siècle, autour d'un concept qui est celui de l'écologie humaine (=sociologie urbaine: occupation de l'espace urbain, …). Les sociologues de l'école de Chicago sont marqués par la notion d'interaction et la nécessité d'enquêtes de terrain, voire même de privilégier ces enquêtes empiriques sur la théorie. Ces enquêtes de terrain se sont développées en sociologie urbaine dans le contexte de l'urbanisation des États-Unis. De 1870 à 1930, la ville de Chicago passe de 360 000 habitants à 3 400 000 habitants ( population multipliée par 10 en 60 ans). Ils vont s'intéresser aux instersis urbains ( endroits abandonnés qui vont être appropriés par des populations immigrantes, étrangères qui arrivent), aux espaces de la ville qui ne sont pas disposés pour les installations humaines mais qui finissent par être appropriés par des populations. Cela les a également amené à s'intéresser à la question des ghettos. Une importance énorme est attachée aux enquêtes empiriques dans cette école de Chicago: place très forte attribuée à la démonstration de la preuve. Ce souci de preuve rapproche l'école de Chicago de la sociologie durkheimienne, alors que l'interaction la rapproche de la sociologie weberienne.

Deux auteurs importants dans cette école:

 

-William Isaac THOMAS ( 1863-1947): il a rencontré Simmel en Allemagne et a développé deux thèmes: la socio-urbaine et les discriminations de genres ou de races. Au début du 20eme siècle traiter de ces discriminations, c'est très avant-gardiste; d'autant plus aux États-Unis avec l'apartheid. Il sera très critiqué dans son travail car il est également très engagé, c'est un militant pour l'égalité entre races et sexes et il est favorable à l'émancipation des femmes et des noirs américains. Il demande à ses étudiants de faire des enquêtes mais les incite également à s'engager. Ses positions radicales feront qu'il sera exclut en 1918 de l'université de Chicago. Le concept fondamental de Thomas est l'idée de situation: selon lui, ce qui est important ce n'est pas ce que les gens croient ou font, mais c'est la situation dans laquelle les gens croient et font des choses. C'est la manière dont fonctionnent ces actions et croyances qui font la société. « Quand des hommes définissent des situations comme réelles ( quand ils croient des choses), elles sont réelles dans leurs conséquences ( = ce sont des faits) » Thomas. Cette formule cherche à réunir, à regrouper l'objectivisme ( ce que les gens font) et le subjectivisme ( ce que les gens croient). Par exemple, il dit que lorsque des clients se mettent à croire qu'une banque est insolvable, même si c'est pas vrai, et bien ils la rendent insolvable ( par peur). Il dit qu'il y a une croyance d'une infériorité de certaines races par rapport à d'autres et en la supériorité de la race blanche: c'est une discrimination objective ( séparation, ...). Dans les années 50, ils ont travaillé sur la ville de Vienne sur le Rhône, dont les habitants se plaignaient d'un trop grand nombre d'indo-chinois: forte croyance d'une trop forte présence des indo-chinois, ce qui s'est traduit par des propos racistes et des discriminations de la population vers ces minorités. Il y avait 25 000 habitants et 1727 étrangers et parmi eux seulement 4 indo-chinois. Les croyances collectives engendrent la réalité, leur propre réalisation.

Thomas avait une position radicalement différente de Durkheim sur la question de la prénotion et de la rupture: pour Thomas, le sociologue doit tenir compte de ces croyances, de ces systèmes d'idées et les faire entrer dans l'analyse; contrairement à Durkheim qui nécessite la rupture avec le sens commun, les prénotions.

 

-Robert Ezra PARK ( 1864-1944):c'est un ancien journaliste d'investigation qui fait une formation de sociologue à l'école de Chicago, et il remplacera Thomas lorsque celui-ci est renvoyé de l'université. Il attache également de l'importance au terrain, et a rencontré Tönnies et Simmel en Allemagne.

Il s'oppose à Thomas sur l'engagement militant du sociologue: il estime qu'il doit rester en dehors des faits pour les observer, et donc en dehors des mouvements sociaux. Ses enquêtes empiriques seront sur la socio-urbaine et les interactions entre les individus et ses enquêtes empiriques l'amèneront à construire une typologie des interactions sociales.

 

La typologie des interactions:

  1. La compétition: forme universelle de l'interaction, les individus sont en compétition entre eux; en compétition pour des biens matériels, pour des biens symboliques, ou du pouvoir ( au sens large: pouvoir politique et pouvoir sur l'espace).

  2. Le conflit: ces compétitions peuvent se traduire en conflits, c'est donc une conséquence conjoncturelle de la compétition.

  3. L'accommodation: c'est un processus de compromis, une adaptation à l'ordre par compromis.

  4. L'assimilation: incorporation dans un groupe dominant.

 

Cette typologie n'est plus vraiment à l'ordre du jour.

 

L'école de Chicago a des héritiers, des continuateurs. Il reste de ce courant, une très grande méfiance du cadre théorique ( privilégie les enquêtes empiriques: techniques d'observation, mais aussi qualitative).

 

Continuateurs Français:

Jean Peneff, L'hôpital en urgence, 1992 → il s'est fait embaucher aux services d'urgence pour comprendre leur système et fonctionnement.

Pilippe Masson, Les coulisses d'un lycée ordinaire, 1999 → s'est présenté comme professeur.

Daniel Bizeul

David Lepoutre, Coeur de banlieue → David Lepoutre s'est fait professeur dans la cité des quatre milles.

 

Continuateurs Américains:

Everett Hugues, Le regard sociologique, 1996

Howard Becker, Outsiders, études de sociologie de la déviance, 1995

Nels Anderson, Le Hobo, 1993

 

C- Des approches plus synthétiques: les sociologies constructivistes

Deux auteurs ont transcendé la division entre acteur et agent, donc entre sociologie durkheimienne et wéberienne:

- Norbert Elias ( 1897-1990): c'est un allemand qui est né dans une famille assez aisée, ayant des industries de textile: c'est de la bourgeoisie industrielle. Ses études sont interrompues par la guerre 14-18, et il les reprendra en 1919 avec des études de philosophie à l'université de Breslau et qui lui feront connaître les travaux de Max Weber. Il rejoindra en 1930 l'institut de recherche sociologique de Francfort. En 1933, il quitte l'Allemagne car il est d'origine juive et la prise de pouvoir d'Hitler inquiète sa famille. Il va alors en Suisse, à Paris et finit par arriver en 1935 en Angleterre qui va l'accueillir en lui offrant une aide financière pour les réfugiés juifs; ce qui lui permettra de survivre et de travailler à son œuvre principale: Le processus de civilisation. Il obtiendra pendant la guerre 39-45 des postes de sociologue remplaçant dans les universités anglaises ( Angleterre: libéralisme économique mais également libéralisme intellectuel). Au lendemain de la guerre 39-45, il doit quitter son poste car les sociologues anglais reprennent leur place; il donne alors des cours privées pendant une dizaine d'années à Londres et ira ensuite enseigné de 1962 à 1969 en Afrique, à l'université du Ghana. Dans les années 1970, ses travaux et œuvres sont seulement reconnus ( reconnaissance tardive), ses travaux anglais commencent à être traduits, il est invité à des conférences. En 1970 il s'installe dans le centre de recherche interdisciplinaire à Amsterdam. Sa perspective théorique: il a essayé de transcendé l'opposition entre objectivisme et subjectivisme et selon lui, il faut partir de la société pour comprendre l'individu et en même temps, partir de l'individu pour comprendre la société: la démarche holiste et la démarche individualiste sont indissociables.

→ Démarche holiste: partir du tout, de la société pour comprendre l'individu. Son ouvrage: La société de cour.

→ Démarche individualiste: partir de l'individu pour comprendre la société. Son ouvrage: Mozart, sociologie d'un génie.

Pour lui, la question n'est pas de choisir entre Durkheim et Weber, les deux sont complémentaires.

Il développe des concepts de configurations, d'interrelations et d'interdépendances. Le concept de configurations est le concept le plus utilisé: les individus sont pris dans des configurations c'est-à-dire, des systèmes de positions dans lesquels les individus occupent des positions, des places particulières liées aux interrelations et aux interdépendances avec les individus. Elias explique que dans un match de football, il y a bien-sûr des joueurs, mais chaque joueur occupe dans le match une place particulière mais qui n'existe qu'en interrelation avec les autres joueurs, et les joueurs sont en interdépendances. Le match n'existe pas sans les joueurs mais les joueurs n'existent pas sans le match et les règles → on retrouve donc la complémentarité entre la démarche holiste et la démarche individualiste.

 

Interrelation: plusieurs individus en relation

Interaction: seulement deux individus.

 

«  Dire que les individus entrent dans des configurations, c'est dire que le point de départ de toute enquête sociologique est une pluralité d'individus qui sont interdépendants. Dire que les configurations sont irréductibles, c'est dire qu'on ne saurait les expliquer ni en des termes supposant qu'elles existent d'une certaine façon indépendamment des individus, ni en des termes impliquant que les individus existent en dehors d'elles ». Elias

 

Les configurations ne sont pas figées dans le temps, elles bougent. Elles ne sont pas figées socio-historiquement.

 

Pour Elias, l'objet de la sociologie c'est d'étudier les interrelations, comme Durkheim définit comme objet d'étude le fait social.

 

Ses ouvrages:

  • Le processus de civilisation ( 1. La civilisation des moeurs; 2. La dynamique de l'occident).

  • La société de cour

  • Sport et civilisation

  • Mozart, sociologie d'un génie.

 

Critique de la sociologie d'Elias:

C'est une sociologie peut sensible aux conditions matérielles d'existence, aux injustices sociales, qui s'intéresse très peu aux rapports de production: c'est une sociologie très peu Marxisée. Il y a une tendance à la généralisation, et il a du mal a percevoir les segmentations, les rapports de force à l'intérieur de la société.

 

- Pierre Bourdieu: (1930-2002)

 

 

V- La sociologie de Pierre Bourdieu: 1930-2002

C'est le fils d'une famille de fonctionnaires d'état ( son père travaillait dans le service des impôts), né dans le sud-ouest. Il réussit assez bien à l'école. Il a fait des études de sociologie et s'est un peu opposé à la philosophie, et a publié des travaux empiriques dès les années 60. Il fera des travaux sur l'Algérie. C'était un bon élève mais dissipé. Il contribue à l'institutionnalisation de la sociologie en créant une revue nommée Acte de la recherche en sciences sociales. Il est très vite nommé au Collège de France. En 1968, il va se fâcher avec Raymond Aron qui était son directeur de thèse, car il n'est pas très engagé politiquement. Il le sera à partir des années 80 quand il s'engagera dans les mouvements de la gauche de la gauche.

 

 

Film: La sociologie est un sport de combat

→ reproduction sociale

→ domination masculine

→ présentation du métier de sociologue

→ question de l'engagement du sociologue: interactions entre le sociologue et les gens sur le terrain → difficultés à contrer les prénotions des gens.

 

 

Pierre Bourdieu souhaite transcendé objectivisme et subjectivisme; entre un déterminisme fort chez Durkheim et une part réservée à l'acteur, à l'individu chez Max Weber. Il fait du structuralisme constructiviste ou de constructivisme structuraliste: «  Si j'avais à caractériser mon travail en deux mots, je parlerais de constructivisme structuralisme ou de structuralisme constructiviste; par structuralisme, je veux dire qu'il existe, dans le monde social des structures objectives, indépendante,tes de la conscience et de la volonté des agents, qui sont capables d'orienter ou de contraindre leurs pratiques ou leurs représentations. Par constructivisme, je veux dire qu'il y a une genèse sociale, d'une part des schèmes de perception, de pensée et d'action qui sont constitutif de ce que j'appelle l'habitus, et d'autre part, des structures sociales, et en particulier ce que j'appelle des champs ».

Ce projet sociologique s'appuie autour de concepts clés:

- l'héritage: les individus héritent par la socialisation ou acquière un certain nombre de choses qu'ils peuvent utiliser dans la vie sociétale. Cet héritage est fait de valeurs ( dans le domaine politique, culturel...) qui sont des croyances; de représentations ( visions du monde: bien/mal); de capitaux économiques, capitaux sociaux ( relations sociales mobilisables; → capital d'octonie chez Renahy qui est un capital social proprement populaire), capitaux culturels qui prennent trois formes: le capital scolaire, le capital culturel matériel ( possession de biens culturels), le capital culturel incorporé ( par la socialisation), et d'un dernier capital qui est le capital symbolique ( sur-valeur ajoutée à un certain nombre de choses, de positions sociales, de professions: le médecin est une profession qui a un certain capital sociologue, « docteur »).

Ces héritages sont inégalement répartis chez les individus et sont mobilisés dans des interactions, que Bourdieu appelle des champs qui sont des espaces sociaux qui ont une forme de cohérence. Ils ont une inégale valeur selon les champs dans lesquels on se situe: dans le champ scolaire connaître toute l'équipe de football n'a aucune valeur, par contre savoir citer les auteurs connus du 19e siècle ca a de la valeur.

Bourdieu propose une vision ilinéaire en posant que les capitaux sociaux n'ont pas la même valeurs selon les espaces sociaux. Ce sont ces héritages qui contribue aux inégalités sociales et à la reproduction sociale.

- le construit social: les acteurs et les agents sociaux subissent cet héritage, les capitaux et les institutions, mais dans le même temps les individus contribuent à construire les espaces sociaux. Ce sont des choses produites par les interactions. Bourdieu parle d'agents agissant pour se situer dans l'entre-deux de Durkheim (agent) et de Weber ( acteur); et ces agents agissant étant en lutte pour la définition du monde social, des valeurs qui sont légitimes, des représentations sociales reconnues ou non reconnues. Il y a des modifications de la légitimité de telle ou telle pratique dans l'espace social dans le temps. Une pratique légitime peut devenir illégitime et donc ceux qui la pratique peuvent être exclus socialement. « S'il y a une vérité, c'est que le monde social est enjeu de luttes..../.... la représentation du monde social n'est pas une donné, mais le produit d'innombrables actions de construction qui sont toujours déjà faites et toujours à refaire ».

Il s'oppose au structuralisme de Levis-Strauss.

- Habitus: Principe générateur des pratiques, conduites, comportements, et représentations. C'est le travail de socialisation qui fait qu'on intériorise des valeurs, des représentations, des capitaux et donc l'habitus concentre le travail de socialisation que l'on a subit et que l'on subit encore mais c'est également lui qui nous faire réagir dans les discussions, les débats.... C'est le réceptacle de ce qui nous fait agir, mais également le moteur de nos actions.L'habitus est au sociologue ce qu'au psychologue est l'inconscient.L'habitus est durable, solide, mais ca ne veut pas dire qu'il n'est pas changeable, modifiable mais la modification est lente car les systèmes de valeurs se modifient lentement. Les systèmes de valeurs se modifient par des interactions; par une conversion d'habitus. La modification des systèmes de valeurs reste rare car lorsque l'on rencontre des gens qui sont très différents de nous dans les systèmes de valeurs et de représentations, on a tendance à les éviter, à les fouir. Et les gens n'ont pas l'habitude de se mettre en danger dans les interactions sociales, ce qui fait qu'ils restent à l'écart de ces personnes. On traîne avec des gens qui ont le même habitus que nous, qui nous sont semblables; c'est ce qui fait d'ailleurs la segmentation. On peut également modifier son habitus par un phénomène d'acculturation. L'acculturationc'est lorsqu'on se retrouve dans une situation différente de la situation qui nous a socialisé, dans des espaces sociaux très différents de ce qui nous ont socialisé. La situation d'acculturation peut conduire à une acculturation et nos systèmes de valeurs, notre habitus vont se modifier profondément. La situation de migration ne génère pas toujours acculturation: les situations migrantes qui vivent en communauté et qui continuent d'entretenir les coutumes alimentaires, vestimentaires d'origine. Souvent lors d'une migration, l'acculturation ne se fait qu'à partir de la deuxième et troisième génération. L'école peut également être acculturatrice.

→ Voir Les armoires vides.

Cette notion d'habitus permet a Bourdieu de penser une notion corrélative qui est l'habitus de classe: « Sachant qu'il n'y a pas deux histoires individuelles identiques, il n'y a pas deux habitus identiques, bien qu'il y ait des classes d'expériences, donc des classes d'habitus- les habitus de classe ».

 

La théorie de la connaissance et la théorie du système social chez Bourdieu:

Bourdieu a également chercher la théorie de la connaissance sociologique, il y a contribué → Pierre Bourdieu, JC Chamborédon, JC Passeron, Le métier de sociologue, Mouton, 1973.

Il propose deux principes de base à la sociologie:

- le principe de non-conscience:le principe de non-conscience postule que les agents sociaux ne connaissent pas le sens de ce qu'ils font et que même lorsqu'il croit le connaître, ils engagent dans leurs conduites, pratiques, comportements et représentations, un sens objectif qui n'est jamais réductible au sens vécu → ce que disent les gens pour expliquer ce qu'ils font, ne suffit pas. Les gens disent qu'il se mettent avec quelqu'un parce qu'il l'aime, mais pour le sociologue cela n'explique pas la totalité de la raison pour laquelle la personne est avec telle personne.C'est le contre-pied de l'illusion de transparence.

- le principe ou le primat du déterminisme social pose que la signification des conduites, comportements, pratiques et représentations, est inséparable du système des relations historiques et sociales dans lequel elles s'accomplissent.

 

BIBLIOGRAPHIE:

Questions de sociologies

La distinction, critique sociale du jugement

Le métier de sociologue

La domination masculine

Les héritiers ou La reproduction

Actes de la recherche en sciences sociales

 

 

 

 

 

 

 

VI- La démarche sociologique:

 

 

Il faut sur le discours du sociologue soit différent du discours commun, du discours de tout le monde. Il faut engendrer une démarche.

 

 

 

I- L'ordre des raisons épistémologiques:

Cette expression est empruntée à un philosophe, Gaston Bachelard, qui a beaucoup réfléchit sur la démarche scientifique, rationnelle et le processus mis en place pour avoir une démarche scientifique. Dans la philosophie du nom, Bachelard donne une manière ordrée pour tenir un raisonnement scientifique. Il dit que l'objet de recherche est conquis, construit, constaté. L'objet conquis représente une phase rupture. L'objet est construit est la phase de construction de l'objet. Enfin, l'objet est constaté, c'est l'enquête empirique, le constat empirique.

 

 

1ere phase: la phase de rupture: « l'objet est conquis ».

Chaque individu porte des prénotions, des idées reçues donc le sociologue porte également des prénotions, des idéologies et le but de cette phase là est d'écarter, de mettre à distance ces prénotions, valeurs et idées reçues. Il y a un certain nombre de techniques pour engendrer cette phase de rupture: 3 grandes techniques de ruptures:

- lecture informative, lecture critique: il y a toujours eu des choses de faites ce sur quoi on travail, et la première chose à faire c'est d'en prendre connaissance. On fait des recherche de documents universitaires, on cherche les travaux publiés sur le sujet sur lequel on travail et s'il y a déjà des sociologues qui ont fait des travaux, il faut les lire. On peut également aller voir des disciplines voisines, notamment l'histoire ou la géographie. Il ne faut pas se restreindre mais il faut bien identifier la source: un article de journal n'a pas la même importance qu'un texte de droit. Il y également de la recherche de lecture statistiques. Il faut également exercer un regard critique sur les recueils que l'on lit. Les statistiques sont également très intéressants mais il faut faire attention à l'ambiguïté des chiffres. Le travail statistique est un travail de classement, les catégories sont des fabrications sociales. Il y a beaucoup de chiffres, et il faut faire attention à la manière utilisée de les fabriquer par celui qui les a fabriqué.

- critique lexicologique: il faut que le sociologue réfléchissent sur les mots, à la fois les mots sur la commande qu'on lui a faite et les mots de l'espace social sur lequel on va travailler. Le mot c'est paradoxal chez le sociologue. Le mot est un outils mais en même temps il peut être un danger ( prénotions....). Il y a des mots qui apparaissent puis disparaissent: zones de non droit ( = banlieues), quartiers fragiles... Si les mots divergent, c'est pour cacher une vérité ou parfois pour la mettre en évidence. Il est intéressant d'identifier quand est né le mot et par quelle catégorie sociale il est utilisé.

Patrick Champagne, a repris un sondage sur l'environnement et il a fait des entretiens avec les gens qui ont été interrogé pour comprendre ce que les gens mettaient derrière le mot « environnement ». Il y a une polysémie de l'environnement. 24% des gens mettaient derrière l'environnement les pollutions; 12% pensent que l'environnement c'est la protection des animaux, 26% ont pour image de l'environnement la nature en générale, la montagne et la campagne; 24% voient derrière l'environnement le cadre de vie ( aménagements de par-terre, plantations de fleurs dans les ronds-points); et pour 36%, il s'agit du cadre social autour de chez soi (saleté, les émigrés) et prennent en compte les émigrés.

→ on explique pas par l'ordre naturel: le mot besoin, tendance à, partage.... sont des expressions à l'écart du vocabulaire sociologique. Le mot partage insinue qu'il n'y aurait pas de rapports de domination. Au lieu de parler du partage des tâches domestiques, il parle de divisions sexuelles du travail domestique ( tâches → à la maison, mais lorsqu'il s'agit du marché du travail, on parle d'un travail rémunéré).

- définition préalable:voir dans l'introduction, Le suicide, de Durkheim. Première définition un peu construite, travaillée de l'objet sur lequel on travail.

 

 

2eme phase: La construction de l'objet ( l'objet est construit):

l'idée est de faire un objet de travail, quelque chose qu'on délimite, que l'on vient de définir et que l'on instruit dans les espaces sociaux pertinents pour son analyse. Le suicide par exemple s'inscrit dans le champs de la mortalité, et non de la dépression. Il y a des choix de chercheurs, pas des choix de l'individu lui-même mais du sociologue. C'est un peu ce que Durkheim appelle considérer les faits sociaux comme des choses. Il existe également des techniques de construction de l'objet:

- la définition préalable:c'est ce qui fait passer de la rupture à la construction de l'objet, elle permet un contrôle sur l'objet.

- délimitation du champou de l'espace social dans lequel s'inscrit l'objet qu'on étudie. Il s'agit de construire les contours, les frontières de l'objet et le systèmes des relations sociales dans lequel il s'inscrit. C'est pose des cadres d'analyses privilégiés. On inscrit l'objet dans un champ particulier. Inscrire un objet dans un champ ce n'est pas de l'exclusion ou de l'unicité du champ de l'objet de recherche: c'est poser un champ propriétaire mais qui n'empêche pas que l'objet soit inscrit dans un autre espace social. On peut hiérarchiser ses propriétés mais également définir divers espaces sociaux. Par exemple l'apprentissage peut être inscrit dans le champ des politiques publiques, les établissements d'apprentissage ( CFA), dans les politiques régionales ou encore l'état. L'apprentissage est un enjeu de lutte entre les états et les différentes régions. On peut également introduire les apprentis dans le monde du salariat puisqu'il perçoivent un minimum de salaire, mais également dans le monde de l'éducation. On peut encore inscrire l'apprentissage dans une sociologie des alternances, en général. Il y a plusieurs perspectives, mais dans le même temps elles guident dans l'analyse à tenir.

- système d'hypothèses:le sociologue formule des hypothèses qui l'aider, le guider pour mettre en place ses enquêtes ensuite.C'est une interprétation anticipée et rationnelle de phénomènes sociaux, formulés en termes théoriques et destinés à être soumis à des vérifications empiriques ou théoriques. Certains parle de problématisation au lieu d'hypothèse.

- Il ne faut pas comprendre un système d'hypothèses et un système de prénotions.

- une hypothèse n'est pas une vérité, c'est quelque chose qu'on suppose et qui doit être vérifiée. Il faut la vérifier par un système d'enquêtes, la confronter à la réalité pour voir si elle fonctionne.

Il y a deux niveaux d'hypothèses:

- des hypothèses générales qui sont des hypothèses formulées au niveau théorique.

- des hypothèses de travail qui traduisent en terme observable les hypothèses générales; elles sont un ensemble d'indicateurs qui nourriront les hypothèses générales.

Par exemple, la reproduction sociale est une hypothèse générale mais face à celle-ci on peut mettre en place une hypothèse de travail, des indicateurs qui vont chercher à mesurer les pratiques culturelles au travers des visites des musées. Si je vois que certains groupes d'appartenance sont sur-représentés je peux attester l'hypothèse générale de la reproduction sociale. Le boulot du sociologue est donc de formuler des hypothèses générales, mais celles-ci sont indispensables d'hypothèses de travail, d'indicateurs qui confortent ou qui invalident cette hypothèse.

 

 

3eme phase: Le constat empirique ( l'objet est constaté):

Il s'agit de mettre en place des dispositifs d'enquêtes à partir des hypothèses de travail pour vérifier, valider ou invalider ces hypothèses. On cherche des éléments de preuve.

 

 

Il y a trois grandes phases si on suit Bachelard: rupture, construction et constat empirique. Mais en faite tout cela c'est faux, c'est pas si simple que cela. C'est un ordre qui doit structurer notre manière de faire, mais dans la réalité du métier de sociologue c'est toujours un peu plus compliqué.

J'ai des hypothèses, je fait des enquêtes mais ces dernières invalident mes hypothèses: dans ce cas là il faut retourner à l'étape précédente, à la construction de l'objet. C'est une démarche déductive. S'articule à celle-ci une logique inductive, et elle est présente dans deux cas. C'est le cas quand nos hypothèses sont fausses: il faut reformuler les hypothèses et donc c'est le terrain qui nous amène à cette formulation mais la logique inductive par également du terrain pour formuler une logique d'esprit. Il y a des aller-retours entre la phase 2 et 3 . la démarche sociologique n'est pas strictement linéaire.

De plus, la logique déductive impliquerait que la phase 1 serait terminée, inéchangeable: une fois établie, on ne revient pas dessus. Mais on est toujours dans le risque que nos prénotions, nos idées reçues, notre idéologie reprennent le dessus sur la rupture. La phase de rupture n'est jamais finie une fois pour toute, il faut entretenir une incessante vigilance épistémologique. La phase de rupture est bien sûr à faire en premier lieu, mais en sociologie il faut toujours réfléchir sur la définition de son objet, sur la rupture avec ses prénotions, ses idées et idéologies. Les confrontations lors de séminaires ou la tenue de journal de bord est un bon moyen pour la phase de rupture dans le métier de sociologue.

Enfin, dans la phase de rupture on peu être à mobiliser des outils qui relève de la phase du constat. Dans la phase de rupture on peut également choisir d'aller faire des enquêtes de terrain dès le début, histoire de mieux connaître l'objet sur lequel on va travailler: ce sont des entretiens exploratoires.

 

→ Il n'y a pas strictement une hiérarchisation des actes épistémologiques, mais il y a imbrication.

 

 

B- Les outils d'investigation sociologique ( zoom sur le constat empirique):

Ce sont les techniques du constat empirique, c'est la caisse à outils du sociologues. L'idée c'est de pouvoir mesurer, classer, compter les choses sur lesquelles on travaille. Il y a 4 grands techniques du constat sociologiques:

- des techniques dites d'observation:c'est un outil qui repose sur le regard, sur la vue, l'observation. Cette méthode est empruntée aux sciences naturelles mais qui est également communes aux ethnologues et anthropologues. L'observation consiste à recueillir des informations sur les agents sociaux, en captant leurs comportements et leurs propos au moment où ils se manifestent. L'objectif étant de saisir des activités, des interactions, des comportements, des relations, des rites, etc... Il y a plusieurs manière de faire de l'observation:

    • l'observation participante: observations en participant, en étant membre de la pratique ou du groupe que l'on veut étudier. On se mêle aux activités, on doit apparaître comme membre → Renahy est un gars du coin lui-même

    • l'enquête christique: c'est une forme radicale de l'observation participante. Le christ s'est fait homme parmi les hommes et donc l'enquête christique c'est le sociologue qui se fait x parmi les x mais en se déguisant, en se transformant, en se contrôlant → Peneff, « Les urgences », il s'est fait embaucher en modifiant son CV et donc en devant contrôler ses paroles, ses mots → création d'un autre personnage ( alors qu'avec l'observation participante, c'est plus normal, plus naturel: on étudie le milieu dans lequel on est, il n'y a pas de maquillage de soi).

    • l'observation non participante: on dit au groupe que l'on est sociologue, on se met dans un coin et on observe le groupe. C'est utilisé en sociologie de l'éducation pour étudier les interactions.

      L'intérêt de la technique de l'observation, c'est que la saisie des choses se fait sur le vif, on voit directement ou entend ce que les gens font; ca nous est pas raconté ensuite. Il n'y a pas de médiation langagière. La principale limite c'est que ca suppose un travail de mémoire. Pour se protéger de cette difficulté c'est l'entrainement, mais aussi de penser des grilles d'observation ( avant d'aller faire une séance d'observation, on se dit je vais mettre l'accent sur quelque chose: sur les couleurs, sur les interactions, ...). Il y a également des risques d'ethnocentrisme: quand on regarde les choses, on a nos propres catégories de visions, d'analyses et il faut faire attention que ces cadres ne parasitent ce que l'on voit, en évitant de juger. Il faut réussir à décrire ce que l'on a vu comme une caméra, et il ne faut surtout pas juger sinon on ne voit rien.

 

Bibliographie dont la technique est l'observation:

. GOFFMAN Erving, Asile, Minuit, 1968; La mise en scène de la vie quotidienne, Minuit, 1973.

. SCHWARTZ Olivier, Le monde privé des ouvriers, PUF, 1990

. MASSON Philippe, Les coulisses d'un lycée ordinaire, PUF, 1999

. BIZEUL Daniel, Avec ceux du FN, Editions La Découverte, 2003

. RENAHY, Les gars du coin

 

- Des techniques d'entretiens:

- les enquêtes par questionnaires

  • les données institutionnelles.

 

Deuxième technique, la technique dite de l'entretien

L'entretien est un recueil d'informations enregistrées dans une situation de face à face. On n'enregistre pas clandestinement. Mais en échange on garantit l'anonymat.

L'entretien :

  • non directif : c'est un entretien pour lequel on a peu de questions à poser. Il n'est pas court, mais le thème est très large. On veut que les gens se raconte, sans que l'on force leur parole. Les questions formulées ne sont pratiquement que des questions créées à partir de ce que les personnes racontent. Généralement ce type d'entretien est utilisé sur les récits de vie et les biographies, on demande à ce que la personne raconte son expérience. On ne prévoit pas de question à l'avance.

  • semi – directif : Là on a une grille de 15, 20 questions sur des thémes sur lesquels on veut absolument passer. On a des thémes contraints.

  • Directif : ce serait un entretien où toutes les questions sont écrites. Il n'est pas pratiqué en sociologie.

 

L'entretien est une interraction sociale fictive, une fiction sociale, c'est une relation qui n'aurait pas du avoir lieu dans l'ordre social. Il y a un savoir social qui s'aquiert par expérience. Si la personne n'est pas en confiance, l'entretien peut être raté, surtout pour des personnes d'origine sociale éloignée du sociologue. La grande richesse de l'entretien c'est que c'est un matériel enregistré. Avec l'enregistrement, il n'y a plus de problème de mémoire. On fait aprés une grille d'analyse des entretiens. On a des colonne, pour chaque colonne un théme développé dans un entretien. Chaque ligne représente un des entretiens. A l'intersection on recopie les phrases les plus significatives de l'entretien dites sur le thème correspondant. Aprés une lecture verticale, on peut voir ce que disent toutes les réponses pour un même thème. On peut aussi faire des portraits, et là du coup on utilise la grille d'analyse avec une lecture horizontale.

Quelques exemple de travaux qui utilisent la méthode de l'entretien :

SCHNAPPER Dominique, L'épreuve du chômage, Gallimard, 1981

BOURDIEU Pierre, La misère du monde, Seuil, 1993

BEAUD Stéphane, 80% au bac et après? La découverte, 2002

 

BLANCHET Alain , GOTMAN Anne, L'enquête et ses méthodes : l'entretien, Nathan, 2001

 

L'enquête par questionnaires

 

Définition : Traduit en termes collectifs, des réponses individuelles, elle cherche à objectiver des actions vécues comme individuelles en en résistuant les sens collectifs. Elle a pour ambition d'expliquer ce que les acteurs font par ce qu'ils sont et non par ce qu'ils disent de ce qu'ils font. C'est l'idée dukheimienne d'expliquer par l'appartenance de sexe, de milieu social.

L'intérêt de l'enquête par questionnaire c'est que c'est l'outil parfait pour rendre compte des dimensions collectives de la société. Sans elle, on ne peut pas montrer la règle de l'homogamie sociale. Outil statistique important. Analyses factorielles de correspondance, outil statistique, utiles pour construire des typologies de comportement.

L'inconvénient est que les réponses recueillies sont plus pauvres que lors d'un entretien ou d'une observation. Le questionnaire est aussi une fiction sociale, on crée un artefact social comme pour l'entretien. La dernière limite est qu'il est assez long à mettre en place, au minimum 100 questionnaires, mais au mieux 200 ou 300. Ensuite il faut faire un travail de codage, on transforme les mots en chiffre. C'est un processus longtemps peu utilisé par les sociologues car il entraîne un travail long, aujourd'hui simplifié grâce à l'informatique.

Quelques exemples de grandes enquêtes utilisant le questionnaire :

BAUDELOT Christian et al., Et pourtant ils lisent !, Seuil, 1999

BAUDELOT Christian, GOLLAC Michel, Travailler pour être heureux?, Fayad, 2003

ELICH Valérie, Les nouveaux étudiants, A. Colin, 1998

 

SINGLY

 

 

 

Les données institutionnelles.

Il y a pleins de données statistiques produites pour toutes sortes de choses qui sont sous exploitées, elles sont produites par des grandes institutions comme les ministères, l'INSEE, mais aussi les entreprises. Ce sont des mines qui peuvent être utilisées par les sociologues, mais il faut les utiliser avec prudence car il faut réfléchir sur qui produit les chiffres et dans quel but.

Quelques sources produisant des sources fiables :

  • L'INSEE

  • L'INED

  • Le CEREQ

  • La DARES

  • La DEPP (ex DEP)

 

 

CONCLUSION :

  • C'est l'objet de recherche qui doit dicter les méthodes que l'on utilise, et non le contraire. Il y a donc l'idée de choisir les outils les mieux adaptés par rapport à l'objet d'étude.

  • La caisse à outils n'est pas limitée : documents, archives, iconographies, films, cartographie.

  • L'usage des outils est rarement exclusif.

 

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C
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