Histoire Contemporaine Discipline II (3)

Publié le par Licence1 sociologie Poitiers

L'EUROPE AU XIX SIECLE : L'INDUSTRIALISATION

 

Le XIX ème siècle, siècle de la « révolution industrielle » qui transforme profondément le mode de vie des européens et leur environnement entre l'époque napoléonienne et la « belle époque ». Jamais une société n'avait connu un changement aussi rapide, soutenu par une croissance économique interrompue. Pourtant, si l'image de la « révolution », née dés le début du XIX ème siècle se comprend elle est en partie trompeuse surtout à l'échelle de toute l'Europe. Les historiens préfèrent parler plus prudemment de l'industrialisation pour désigner un processus long, progressif, complexe, inégal ( en 1914, il commence seulement dans l'Europe Méditerranéenne ou Orientale ) qui fait passer l'Europe de la société agraire traditionnelle où l'activité économique agricole est dominante à la société industrielle.

Il est fondamental de commencer par rappeler que l'on distingue classiquement deux grandes phases d'industrialisation. Un repère chronologique fondamental : les historiens distinguent deux grandes phases d'industrialisation : la « 1ère industrialisation » commencée vers 1750 s'achève dans les années 1870 puis vers 1880 une « 2ème industrialisation » prend alors le relais, jusqu'aux années 1930)

On a commencé à parler de révolution industrielle ( en utilisant le terme de révolution en référence à l'épisode révolutionnaire français) mais cependant nous devons remarquer que ce terme n'est pas adapté pour décrire cette période de l'histoire, car par révolution nous entendons un phénomène soudain, brusque, violent. En matière économique, cette image de « révolution industrielle » est trompeuse, il n'y a vraiment une «  révolution » industrielle mais plutôt une progressive industrialisation de l'Europe. Le terme de révolution a tendance à trop schématiser la réalité, l'industrialisation du territoire européen est progressive et inégale : certaines régions sont à l'écart de ce processus et toutes les régions ne sont pas touchées au même moment ni par la même intensité.

 

 

I ) La Ière industrialisation (jusqu'aux années 1870)

 

A ) Une croissance continue « tirée » par l'industrie

 

L'ensemble des économies en Europe connait une longue phase de croissance qui n'est jamais interrompue, et dans laquelle nous sommes toujours.

L'Europe occidentale, d'abord la Grande-Bretagne, puis la Belgique et les Pays Bas, est entrée dans une phase de croissance continue. C'est une phase de croissance durable, croissance de la production de richesse. Chaque année on produit plus que la précédente, il y a croissance du PIB mais la croissance s'appuie aussi selon les économistes sur une croissance de la productivité qui ne cesse d'augmenter, c'est à dire dans la productivité du travail, le fait que chaque unité de travail produit de plus en plus et il n'y a jamais de recul.

Là où touche la spécificité économique du phénomène, c'est le fait qu'il y a de plus en plus de machines et qu'elles produisent de plus en plus. Elles augmentent la production sans que le nombre de travailleurs n'augmente. Comme chaque travailleur produit plus, la richesse disponible par tête tend à augmenter. Même s'il y aussi une forte croissance démographique, la croissance économique est suffisante pour la dépasser et donc la richesse par habitant augmente elle aussi et avec elle le niveau de vie moyen des européens ne cesse d'augmenter.

Ce qui est nouveau c'est le fait que cette croissance soit continue et durable. D'une part, cette croissance est ininterrompue et de l'autre part le rôle de l'industrie, ce qui est nouveau, il a une montée en puissance des activités industrielles. Jusque là, l'activité économique ne se jouait que sur le secteur agricole, mais on assiste désormais au rôle de l'industrie qui devient primaire.

La production industrielle croit plus vite que la production agricole et des services. La part de l'industrie dans le PIB augmente, de même que la part des travailleurs dans l'industrie dans l'ensemble de la population active : de plus en plus d'actifs qui travaillent sont des ouvriers.

Dans le même temps, la production agricole croit aussi mais le nombre de travailleurs dans ce secteur ne cesse de diminuer comme un phénomène de transfert bien connu entre l'agriculture et l'industrie. La production agricole progresse aussi mais avec de moins en moins de bras. La productivité augmente donc beaucoup.

 

L'Angleterre est très en avance dans ce processus, dés 1820 en Angleterre il y a plus d'ouvriers travaillant dans l'industrie que de travailleurs agricoles.

La France connaît une évolution assez différente : il faut attendre 1930 pour qu'il y ait plus d'ouvriers que de paysans même si le pays connaît aussi une industrialisation avec un rythme plus modéré, le nombre d'ouvriers augmente et le nombre de travailleurs dans le secteur agricole ne cesse de diminuer.

 

Grande - Bretagne

Agriculture

Industrie

Services

1801

35%

30%

35%

1871

15%

45%

40%

France

 

 

 

1806

65%

20%

15%

1881

46%

30%

24%

 

 

C'est donc cette augmentation continue de la production industrielle, mais aussi la part croissante de l'industrie dans l'activité économique qu'on appelle industrialisation.

On passe à des sociétés industrielles. L'origine des richesses est beaucoup plus diversifiée, la terre compte moins et les actions que l'on a dans les entreprises industrielles comptent plus.

 

 

 

 

B ) Le lent essor du machinisme

 

L'industrialisation est-ce avant tour des nouvelles machines? Dans un premier temps, c'est une erreur de donner trop d'importance aux machines. Au départ, tout n'est pas dans la machine. Mais si on parle du XIX ème siècle, on ne peut mettre de côté le machinisme, ou la tendance à la prolifération des machines, car la société est de plus en plus mécanisée.

 

Les contemporains, hommes du XIX ème siècle, ont été frappés à l'époque de Napoléon en Angleterre par l'essor du machinisme. Durant cette époque, l'Angleterre a subi le blocus continental orchestré par Napoléon qui n'arrivait pas à dominer la Grande-Bretagne. Il a essayé d'asphyxier l'Angleterre en bloquant les relations navales extrêmement importantes, privant l'Angleterre de produits d'approvisionnement. Les conséquences de ce blocus auraient pu être désastreuses pour l'Angleterre qui était traditionnellement une puissance maritime, mais les anglais ont su résister à ce blocus et y ont trouvé un fort avantage en développant les productions intérieures.

 

C'est finalement un moment assez décisif de décollage pour l'industrie britannique. Pour résister au blocus on a stimulé les productions intérieurs. Même si l'Angleterre connaissait dès la seconde moitié du XVIII ème siècle une poussée décisive, le pays a commencé à se couvrir de machines. On voit que quelques contemporains s'étant portés sur la question, comme Ricardo et Malthus, ont été très frappés par l'augmentation du nombre de machines dans le pays, par leur rôle de plus en plus important, et notamment au rôle du progrès technique qui commençais à faire son apparition. Ils ont le sentiment qu'ils assistent à un changement radical et soudain, ils voient dans l'industrialisation de l'Angleterre le signe d'une époque nouvelle et c'est là que l'on commence à employer le terme de révolution industrielle.

 

Il y a un autre élément qui a eu lieu parallèlement à la mise en place du machinisme : c'est le ludisme. Ce sont les révoltes d'ouvriers contre les machines au début du XIX ème siècle dans toute l'Europe. Les ouvriers se mettent à casser les machines car ils estiment que ce sont des tueuses de bras, elles remplacent les hommes et les mettent au chômage, ou font diminuer les salaires.

On a appelé ces phénomènes le mouvement du ludisme avec un pic en 1812 et en 1816, où se produisent des révoltes spectaculaires, très violentes. On avant tendance à penser que les machines étaient en train de changer la face du monde.

 

Tout au long du XIX ème siècle et jusqu'au début du XX ème siècle, pendant longtemps les historiens ont pensé que l'industrialisation découlait essentiellement des inventions et des ruptures technologiques du XIX ème siècle et c'est pour cela que l'on a beaucoup utilisé le mot « révolution ».

Évidemment la machine emblématique de cette époque c'est la machine à vapeur, alimentée de plus en plus par du charbon, et qui devient le symbole même et même le moteur de la première révolution industrielle. On concentre les ouvriers dans des manufactures avec des machines, et à partir de là on fait des gains de productivité énormes. On produit beaucoup plus par travailleur qu'avant.

 

Sauf qu'il reste une question : pourquoi le progrès technique?

On fait référence aux Lumières, aux savants, aux progrès de l'esprit humain, aux inventions scientifiques... Dans les faits il y en a à partir de la Renaissance, au XVII ème et XVIII ème siècles avec les lumières et le recul de la religion. Mais en fait si des machines sont construites c'est parce qu'il y a des personnes qui ont intérêt a avoir des machines pour produire davantage. Certaines personnes investissent de l'argent du capital car pour eux ce sera rentable. On ne produit pas si l'on ne vend pas. Surtout que les capacités d'investissement à l'époque n'étaient pas gigantesques.

Donc en fait, dans le raisonnement économique la machine n'est pas première. Avant que les machines n'apparaissent il faut qu'il y ait un besoin de ces machines, et donc une demande du marché de ces machines; c'est donc l'économie qui stimule la technique, l'innovation, le progrès technique et non l'inverse.

A l'appui de cette idée, on remarquera qu'il y a souvent un intervalle assez long entre les inventions, les découvertes scientifiques et les premières applications industrielles qui en découlent. En 1710, la machine à vapeur est inventée en Angleterre. Mais il faut attendre les années 1770 avec James Watt pour que les machines à vapeur connaissent une amélioration décisive. Et il faut attendre le début du XIX ème siècle pour que les machines à vapeur se généralisent à toute l'industrie en Angleterre. En 1850, il y toujours plus de moulins à eau en Angleterre que de machines à vapeur : cela nous donne une image de la lenteur du processus qui est lancé.

 

On s'aperçoit que l'innovation, l'application d'un progrès technique dans l'industrie, l'innovation suit la croissance plutôt qu'elle ne la précède. La croissance économique est lente au départ, et les machines arrivent après la croissance. C'est la croissance qui les fait apparaître et ensuite les machines contribuent à accroitre et accélérer la croissance. Le progrès technique permet d'augmenter l'offre, la production. Il répond à une demande, un besoin ressenti et solvable, il y a aura une consommation car on ne produit pas un bien si on ne peut pas le vendre .

Le progrès technique et la mécanisation de la production ne sont pas l'origine de l'industrialisation mais il en sont surtout l'effet le plus visible.

 

Aujourd'hui on explique surtout l'industrialisation par l'élargissement des débouchés liés à l'industrie, l'encouragement à produire davantage. L'élargissement des marché a une double origine:

  • marché international : dans les colonies, aux Amériques. Ce sont des territoires extra européens qui vont de plus en plus acheter, consommer, des produits européens.

  • marché interne : c'est un marché qui tend à s'élargir avec la croissance démographique avec une progressive élévation du niveau de vie de la population qui peut consomme davantage.

 

L'élargissement des marchés pousse à investir, à innover, ce qui déclenche un processus cumulatif de gains de productivité. Le progrès technique n'est pas décisif au départ mais il joue un rôle de pus en plus important au fur et à mesure de l'industrialisation. Toutefois pendant la première industrialisation, le machinisme reste relativement limité, surtout sur le continuent.

La plupart des ouvriers travaille toujours dans des structures artisanales ou encore à domicile, notamment à la campagne. Ils travaillent avec des machines globalement encore très simples, ce sont de petite machines. Il y a tout le long de la première industrialisation en fait coexistence et souvent concurrence entre trois grands systèmes de production dans l'industrie:

  • l'artisanat, dans les ateliers qui existent depuis très longtemps. Cet artisanat connaît un mouvement inexorable de déclin, qui se prolonge tout le long du XIX ème siècle.

  • le domestic system : la production domestique, à domicile. Il ne faut pas s'y tromper, ce système existait avant l'industrialisation. Il se maintient au cours de la première industrialisation et connait même au départ un certain progrès, puis il décline à la seconde industrialisation.

  • le factory system : c'est celui qui émerge et progresse le plus lors de la première industrialisation. La concentration manufacturière de la production est organisée autour de machines de plus en plus volumineuses, importantes.

  • Tout le long de la première industrialisation, les formes traditionnelles du travail et d'organisation de la production éclatées et dispersées dans des ateliers et des maisons individuelles continuent à perdurer, notamment en France. Et pourtant même s'il y a une nette majorité d'ouvriers isolés par rapport aux ouvriers travaillant dans les usines, la production et la productivité augmentent régulièrement.

    La technique joue son rôle mais ce rôle n'est pas nécessairement primordial.

 

Aujourd'hui c'est un point où il y a un très large consensus des historiens.

 

C ) Le rôle moteur de l'industrie textile

 

C'est la principale activité industrielle avant l'industrialisation. Car oui avant l'industrialisation, il y a déjà un peu d'industrie dans le secteur du textile par exemple. On l'appelle aussi proto-industrie, surtout une industrie de main d'oeuvre où l'on fait travailler des persnones avec des machines plutôt rudimentaires, le travail de la laine est le plus important, mais aussi dans le lin et dans la soie pour des productions de luxe, de la culture de chanvre... Au XVIII ème siècle, apparaît une nouveauté : le coton, obtenu à partir d'une nouvelle fibre importée des zones tropicales grâce au développement du commerce international. C'est la spécialité des britanniques, et le coton est au XVIII ème siècle le moteur de l'industrialisation en Grande-Bretagne, d'une manière bien plus abondante que la laine. Il y a une forte demande de coton d'abord en Grande-Bretagne, puis progressivement dans toute l'Europe, c'est un secteur pilote pour l'Angleterre.

Il se développe surtout dans le Nord de la Grande-Bretagne ; vers Liverpool, et Manchester.

Il se développe ensuite sur le continent. Mais les britanniques contrôlent le marché du coton, ils l'exportent.

 

 

 

 

 

Il y a plusieurs grandes étapes dans le secteur industriel du textile :

  • On a des fibres de coton qu'il faut transformer en fil : LE FILAGE.

  • Ensuite, il faut tisser le fil pour en faire du tissu : LE TISSAGE.

  • On teint, on blanchit le tissu : LA TEINTURE, qui fait jouer des colorants avec diverses techniques, faisant appeler notamment à l'industrie chimique.

  • En fin de filière on finit par fabriquer des vêtements, LA CONFECTION.

 

On peut suivre au fil du XVIII ème siècle les progrès de l'industrie du coton avec la modernisation progressive des différentes filières. L'opération n°2, le tissage, a été modernisée avec une invention technique : la Navette volante, qui multiplie par quatre la productivité du tissage, en une heure on produit quatre fois plus qu'avec les méthodes traditionnelles.

 

Cela créé des problèmes au niveau du filage : le filage ne suit pas le rythme du tissage. Le tissage est alors en manque de fil. Vu que la demande est là, on pourrait augmenter la production mais on n'a pas les matières premières suffisantes. Il y a donc une demande d'innovation du côté du filage. Du coup, cela entraîne une stimulation des inventions, et on aboutit finalement à une mécanisation du filage qui remplace progressivement le filage à la main. Entre 1770 et 1780 l'Angleterre se recouvre de manufactures du filage.

 

Du Coup, on produit beaucoup plus de fil, et du coup le tissage est en retard sur le filage. Le processus se poursuit alors, il y a une logique d'entrainement, le tissage doit être complètement mécanisé et donc entre 1800 et 1830 on assiste à une mécanisation du tissage. Donc à partir des années 1830 on assiste au recul de la proto-industrie rurale. Sur le continent européen, le développement de la mécanisation ne se fait qu'après 1850, ils ont retard important par rapport à la Grande-Bretagne.

 

Les autres branches du textile, comme la laine, le lin, la soie, suivent le même mouvement que le coton mais il est décalé chronologiquement, c'est surtout au XIX ème siècle que les procédés techniques du coton sont adaptés à la laine. C'est donc l'ensemble de la filière textile qui se mécanise tout le long de la première industrialisation. Donc toute la mécanisation est tirée par une demande en hausse.

 

Il faut bien voir que ce secteur textile est un moteur de l'économie, de l'industrie, dans la mesure où l'augmentation très importante de la production et de la productivité, entraine des progrès dans d'autres secteurs. Par exemple, les colorants. L'industrie chimique produit ses colorants, elle propose des produits en grande qualité de teinture en grande quantité, elle est donc tirée par le haut par le textile, tout comme la soude utilisée pour blanchir les textiles.

 

Avant même l'industrie chimique, vu qu'on utilise beaucoup de machines, il faut pouvoir les construire. Il y a une réelle industrie de la construction mécaniques, que ce soit dans la production ou dans la vente de ces machines. Le secteur du textile est le premier consommateur de machines; ce sont les industriels du textile qui investissent. Ils font construire de nouvelles machines en métal, au contraire des anciennes machines qui étaient en bois, et cela se traduit par des progrès considérables. Il y a donc un autre secteur industriel qui est tiré par le textile, la métallurgie qui sert à produire les machines.

On a aussi besoin de mines, de charbon en particulier, pour alimenter les machines. On en produit de plus en plus.

Mais le textile reste l'industrie dominante. En 1860, plus de la moitié des ouvriers britanniques et plus de la moitié des ouvriers français emploie des ouvriers dans le secteur du textile. Ce chiffre va progressivement décliner, mais reste quand même important au XIXème siècle à la fin de la première industrialisation ( y compris dans la confection et dans l'habillement ).

 

 

D ) Progrès des transports et « révolution ferroviaires »

 

La première industrialisation a très largement précédé le 1er chemin de fer. Le chemin de fer ne commence pas à faire son apparition avant les années 1820 et encore à ce moment là nous ne sommes qu'au stade de l'invention, alors que la première industrialisation a commencé dans les années 1750 comme nous l'avons déjà vu. Concrètement, le chemin de fer s'implante en Angleterre dans les années 1830 et sur le continent c'est dans les années 1840 que l'on développe l'extension du chemin de fer.

 

Quand le chemin de fer apparaît, l'industrialisation est donc déjà bien commencée. Il arrive en fin de course de la première industrialisation.

Il est difficile d'envisager le fait que l'industrialisation puisse avoir eu lieu s'il n'y avait pas eu une modernisation importante des transports, qui a eu un rôle décisif dans toute l'économie. Pour qu'il y ait une modernisation générale de l'industrie il fallait qu'il y ait une amélioration des transports.

L'industrialisation s'est appuyée sur les transports traditionnels : par routes, par eaux ( transports fluviaux ) connaissent des progrès continus à partir du XIX ème Siècle. Les routes s'améliorent, dans le cadre des progrès du génie civil ( construction de ponts, de tunnels creusés par exemple dans les Alpes, facilitant la circulation, de voitures à cheval plus solides et qui vont de plus en plus vite... ).

Les transports fluviaux connaissent des progrès, dont le rôle est important dans le transport des marchandises lourdes, plus facile à transporter par voie d'eau que par route. Et on commence à voir se faire les débuts de la navigation à la vapeur.

 

C'est toute une série de petits progrès qui s'écoule sur une décennie dont l'aboutissement est le développement généralisé du chemin de fer. C'est tout un mouvement qui aboutit au chemin de fer.

 

 

A partir du moment où il apparaît, il a un rôle important. On assiste à une « révolution ferroviaire » , le chemin de fer a permis de prolonger l'industrialisation, la croissance à partir de 1830-40.

Grâce à la construction du réseau de chemin de fer, les marchandises sont transportées plus rapidement et plus facilement, et c'est dans ce cadre là que le chemin de fer est dans un premier temps prioritairement utilisé, plutôt que dans le transport des personnes. On a une demande de transport plus sur, plus rapide et moins coûteux et c'est pour cela que la construction des chemins de fer vaut le coup même s'ils sont très couteux. Le chemin de fer stimule lui ensuite l'industrialisation.

 

Les effets de la construction des chemins de fer sur l'industrialisation :

  • pour simplifier le transport des marchandise, à la fois les rendre plus rapides, plus sûr et surtout en diminuer le coût. En diminuant le coût, on diminue aussi les coûts des produits, et du coup on vend plus, on peut mettre plus d'argent de côté pour investir... ce qui stimule la croissance. Une fois construit, le chemin de fer facilite la circulation des profits, du coup cela élargit les marchés économiques ouverts, par exemple le transport des fruits et légumes qui, grâce aux avancées techniques apportées par le développement du chemin de fer vont pouvoir être transportés en arrivant encore frais à destination.

  • En réalité, il y a un effet en amont. C'est la stimulation que la construction même de ces réseaux de chemin de fer a eu sur l'économie : il faut produire des trains, des locomotives, des rails... En bref, toute une série d'équipements, d'infrastructures, sont nécessaires au fonctionnement du réseau de chemin de fer. Il y a donc une forte demande de métal, de machines ( les locomotives ) donc cela développe la métallurgie, la sidérurgie, la construction mécanique avec des entreprises spécialisée dans la construction des trains et on peut voir des industries de pointe s'accélérer. En matière de métallurgie, le chemin de fer joue un rôle essentiel pour le passage du fer à l'acier, dérivé plus solide et résistant que le fer car il est chauffé à plus haute température, et pour le fabriquer il fallait passer au charbon. Les premiers rails du chemin de fer étaient en métal et s'usaient rapidement, les rails avaient une durée de vie qui n'était que de quelques années. On s'est aperçu qu'en remplaçant les rails en métal par des rails en acier, la durée de vie des rails était considérablement augmentée. Cela a été un stimulant décisif pour que l'on fabrique beaucoup plus d'acier, et du coup on a inventé des mécanismes pour faire baisser les coût de production de l'acier.

  • Le chemin de fer a été l'occasion d'un certain nombre d'innovations économiques et financières. Il se trouve que construire le réseau de chemin de fer coûtait très cher. Un tel projet n'était pas rentable à court terme, il fallait donc être prêt a risquer beaucoup d'argent et attendre longtemps pour qu'il se mette à rapporter.

    La question est alors de savoir qui peut se permettre de financer un tel projet. Dans tous les pays, les était ont toujours joué un rôle important dans le développement de leur réseau ferroviaire, prenant en charge la construction des infrastructures de transports. C'est l'État qui se charge de la construction des réseaux de chemin de fer et ce sont les compagnies privées qui ont développé l'exploitation de ces réseaux. (gare...).

    Dans les débats politiques à ce moment là une question est posée : L'Etat doit il jouer un rôle pour encourager l'industrialisation? Cette question est importante car le rôle de l'État ne cesse de s'accroitre à partir de là. Les investissements nécessaires à la construction sont pris en charge par des grandes sociétés anonymes par actions. Il en existait très peu à l'époque, ce sont quelques grandes compagnies minières, et c'est pour les chemin de fer qu'apparait cette forme d'organisation économique qui est appelée à jouer un rôle de plus en plus important. Ce sont les grandes compagnies minières qui drainent, grâce aux particuliers qui investissent. La conséquence de cela est que personne ne prend un risque excessif, des milliers de gens mettent un peu d'argent pour financer le projet de construction du réseau du chemin de fer. Les personnes qui investissent sont surtout issues de la classe moyenne, de la petite bourgeoisie. Le fait que l'investissement soit réalisé par tant de personnes a pour conséquence que le risque pour chacun est limité, mais globalement la somme réunie est importante. Cet investissement sera rentable à moyen terme, où l'on commence déjà à pouvoir récolter des retours sur investissement.

 

Quand se forme l'état italien, Cavour premier ministre du Piémont Sardaigne considère que pour faire de l'Italie une véritable nation le moyen le plus efficace est de créer un réseau de chemin de fer italien qui permettra le transport des marchandises.

 

E ) Géographie de la 1ère industrialisation

 

Carte de l'Europe industrielle dans les années 1870, à la fin de la 1ère industrialisation.

 

 

Une première remarque que l'on peut faire c'est que même si l'industrialisation est généralisée dans le territoire, elle n'est pas présente partout, il y a des régions isolées. L'industrie est concentrée dans un certain nombre de régions. Elle n'est pas uniformément répartie sur tout le territoire. Le paradoxe qui mérite d'être relevé c'est que contrairement à ce que l'on pourrait penser dans l'industrialisation il y a des régions industrielles, qui le sont encore pus, d'autres apparaissent, mais aussi des régions se dé-industrialisent, qui perdent une bonne partie de leur puissance industrielle qu'elles avaient avant l'industrialisation. C'est le cas de la France de l'Ouest, qui est à l'écart de la première industrialisation. On s'aperçoit qu'il y avait plus d'industrie textile au XVIIIème Siècle qu'au XIX ème, car le phénomène de concentration de l'activité industrielle qui a vidé certaines régions de leur activité industrielle.

 

L'industrialisation touche la société dans son ensemble, mais elle se concentre dans un certain nombre de régions et certaines restent à l'écart du processus. L'industrialisation est donc loin d'être uniforme.

 

D'une façon générale, l'industrie se développe surtout dans les régions les plus densément peuplées qui sont aussi les principaux foyers de consommation. L'une des nouveautés et originalités de la première industrialisation c'est l'importance des grands bassins miniers, gisements de charbon. Autour d'eux se développent des activités industrielles qui vont chercher l'énergie, ce qui est lié au fait que les transports ne sont pas très développés et pour diminuer les couts de production il faut se rapprocher des matières premières.

C'est ainsi qu'en Grande-Bretagne se détachent de grandes régions industrielles liées au bassins miniers, comme les régions de Bermingam, de Manchester, de Liverpool.

 

La première région industrielle minière en France est au départ dans le Massif Central, assez loin de la région parisienne et des régions peuplées de la France du Nord et de l'Est. Puis l'industrie se développe dans le Nord pas de Calais. Le charbon est une ressource cruciale, et le fer aussi pour la sidérurgie.

Globalement, on voit se dessiner dés cette époque une réalité; la dorsale, médiane européenne, une grande zone qui domine la géographie de l'industrie qui va de l'Ecosse jusqu'à l'Italie du Nord ,en passant par la Belgique et la Rhénanie ( région de la Ruhr ).

Au sien de l'Europe Orientale, nous pouvons signaler un point de développement industriel assez notable.

La dorsale européenne est certes incontestable, mais on voit arriver le point le plus impressionnant : l'Angleterre est plus industrialisée que les autres pays, elle garde une avance conséquence. Elle fait la course lors de la première industrialisation, profitant de sa position dominante. Si on prend les états concernés par cette dorsale européenne et qu'on regarde l'évolution de la production industrielle par habitant entre 1800 et 1860, nous pouvons constater qu'il y a deux grandes classes : la Grande-Bretagne et les autres.

 

 

 

 

Production industrielle par habitant entre 1800 et 1860

France, États allemands

X2

Belgique, Suisse

X3

Grande-Bretagne

x4

 

Cette domination britannique est très évidente dés la fin du XVIII ème Siècle. Même par rapport à la France même si les deux pays ont connu au même moment le début de leur industrialisation,l'Angleterre conserve une avance jusqu'aux années 1860-70, c'est même la première puissance industrielle mondiale. Quel que soit le type de production, l'Angleterre est toujours devant les autres, que ce soit pour les réseaux de chemin de fer, le commerce international... La Grande-Bretagne fait d'ailleurs figure d'atelier du monde à l'époque, comme on peut le dire pour la Chine aujourd'hui, qui reproduit la même place que celle qu'occupait l'Angleterre il y a deux cent ans.

 

On se plaint que les produits anglais inondent le territoire. La concurrence anglaise « ruine » les productions locales... On retrouve toujours le même type de discours. L'Angleterre inonde le monde et notamment l'Europe de ses produits manufacturés, les cotonnades inondent l'Europe et posent des problèmes considérables à tout l'artisanat européen. Les autres pays essaient de limiter la casse, de voler des technologies à l'Angleterre, on fait venir en Allemagne, en France des ingénieurs britanniques. Il y a transfert de technologie, et parfois les idées sont carrément volées. Mais cela n'empêche pas l'Angleterre de rester à la tête de l'économie mondiale.

 

Nous pouvons remarquer que la domination anglaise peut être perçue comme étrange, comme à la base il faut noter que l'Angleterre cumule différents handicaps, ne rendant pas évidente sa position dominante. C'est un territoire un peu petit, qui n'est pas très peuplé, un peu isolé du continent et donc des marchés européens.

En réalité, on s'aperçoit que même avant l'industrialisation, l'Angleterre n'est pas isolée du reste du onde grâce au développement de la marine. La maîtrise des mers est un aspect essentiel de la domination britannique. Les îles développent leur marine, vont conquérir les mers, et c'est cela qui est à la base de la domination britannique. L'Angleterre est donc un pays qui transforme tous ses handicaps en tabou.

 

Au XIX ème Siècle en Angleterre on est en manque de combustibles : le pays compte peu de forêts, les réserves de bois s'amenuisent. C'est ce manque de bois qui fait que l'on est obligé d'aller chercher d'autres sources d'énergie, comme le charbon. Justement le pays en possède, on a d'importantes réserves et en plus le charbon est assez facile à exploiter car le charbon est peu profond, les mines sont en surface.

Finalement le manque de bois devient un avantage pour les anglais alors qu'il aurait pu être un handicap freinant leur développement économique. De plus, le charbon produit davantage d'énergie que le bois, et donc l'Angleterre modernise son industrie beaucoup plus tôt et plus vite que les autres pays.

 

Ainsi c'est très nettement l'Angleterre qui a été la première à faire passer sa sidérurgie au charbon, le coke, dérivé du charbon distillé et ensuite brûlé. Cette technique est plus efficace que la sidérurgie traditionnelle au bois. La sidérurgie britannique est donc plus performante.

 

Rappelons aussi qu'avec le blocus continental orchestré par Napoléon, l'Angleterre est passée prés de l'asphyxie, mais en fait c'est plutôt positif pour les anglais car pendant cette période où ils sont privées d'une grande partie des matières premières, ils ont à ce moment là développé leur industrie à l'intérieur pour subsister leur propre production à celle qu'ils ne pouvaient plus recevoir de produits venant de l'étranger. Ce blocus continental n'a pas trop duré, juste assez pour que cela soit favorable à l'économie britannique.

Pendant une bonne centaine d'années, l'Angleterre a dominé l'économie mondiale.

 

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